Silence de Mort, de Chrystine Brouillet

Une enquête de Maud Graham

Lorsque Vivien Joly vint s’installer dans un quartier élégant du Vieux Québec, il ne s’attendait guère à être confronté aux drames qui s’y joueront ; lui, ce qu’il espère c’est vivre son deuil dans la quiétude, en s’occupant de son jardin, lisant Zola en sirotant un verre de vin, dans le calme et le silence.

Un silence que la « bimbo » Jessie va perturber gravement par les musiques qu’elle fait fonctionner de manière assourdissante pour le voisinage. Sans oublier les fêtes répétées et bruyantes qu’elle et son mari organisent régulièrement.
Il est le seul à oser s’en plaindre, les autres voisins préférant ignorer le jeune couple. Il est vrai que chacun se pose toutefois des questions sur leurs moyens financiers, le mari étant seulement comptable et le couple a une maison et un train de vie assez surprenants pour un salaire de comptable, même compétent.

Lorsque le jeune homme est retrouvé, tué d’une balle en plein front – à l’évidence, un contrat – et que la jeune femme est retrouvée morte étranglée, les enquêteurs n’ont pas beaucoup de pistes vers lesquelles se retourner. Il ne reste qu’à interroger, de manière répétitive, tous leurs voisins qui disent ne rien connaître des relations du couple. Même la très curieuse Nicole, qui a de son côté jeté son dévolu sur le nouveau voisin dont le confort matériel évident l’attire.

Quelque part, près du fleuve, un jeune garçon a été retrouvé battu à mort ; l’enquête est confiée à Maud Graham. De toute évidence il s’agit d’un règlement de compte entre jeunes trafiquants de drogue, car apparemment les lycées et écoles de Québec sont de véritables lieux de trafic. Ce qui ne manque d’ailleurs pas d’inquiéter la policière, dont son pupille adolescent commence à lui donner sérieusement du fil à retordre.
Et ici encore, pratiquement aucune piste, avec en plus la loi du silence bien connue des adolescents qui ne supportent aucune forme d’autorité.

Dans un autre service, le sergent-chef Pierre-Ange Provencher se pose aussi quelques questions sur la mort de ce très jeune trafiquant, car il semblerait qu’une piste mène au fils d’un restaurateur sur qui il enquête ; ce dernier est soupçonné de blanchiment d’argent et semble inattaquable, car une fois encore aucune preuve tangible.

Bref un été très chaud à Québec, et pas uniquement à cause de la température.

Dire que « Silence de Mort » m’ait enthousiasmée serait fortement exagéré. C’est un roman que j’ai trouvé intéressant à lire, mais sans plus.
En fait j’ai plus eu l’impression de lire un roman sur les adolescents et leurs états d’âme qu’un polar. Les adolescents sont très nombreux dans cette histoire, leurs états d’âme à l’égard de leurs parents sont aussi insupportables et crispants que dans la réalité, et je me demande finalement si ce n’est pas cela qui a fait que je n’ai pas apprécié le roman. Dans les crises d’ados, leurs silences, leurs révoltes, leurs moments de haine : j’ai déjà donné ! et voir tout ça étalé sur papier m’a profondément énervée pour les mauvais souvenirs que cela m’a rappelé.

Ce qui est assez affolant, c’est de se rendre compte à quel point il y a des jeunes qui « dealent » aux abords des écoles et dans les soirées. Cela m’a toujours effrayée et j’avoue ne pas être plus à l’aise après cette lecture. Mais pourquoi la police ne fait-elle rien face aux trafics de drogue près et dans les écoles ?

Il semble évident que la romancière Chrystine Brouillet ait voulu donner une dimension psychologique à son roman, qui n’est pas un polar traditionnel – en effet, on connaît tous les assassins à chaque fois qu’ils commettent leur crime.

L’intérêt du livre réside dans l’acharnement de l’enquêtrice et son équipe à trouver le moindre petit indice ; on assiste à une enquête longue et fastidieuse comme elles doivent l’être toutes dans la réalité, j’imagine. Sans coup de théâtre décisif dans les toutes dernières pages où est enfin dévoilé le nom du ou des meurtrier(s).

Le personnage de Maud Graham est relativement sympathique ; elle a – elle aussi – des problèmes pondéraux, ne se nourrit pas toujours bien, a quelques questions existentielles sur l’amour qu’elle vit avec le médecin-légiste. Bref, en dehors du fait qu’elle ne boive pas autant qu’eux, elle ressemble à tous ses collègues-détectives du monde du polar.
Par contre, les relations avec son équipe sont bonnes, ce qui est la partie agréable du roman ; l’amitié entre les membres du district policier fait plaisir à lire.

Elle possède un chat, Léo, ce qui me la rend sympathique également, et je compatis à ses problèmes avec le garçon dont elle est devenue la tutrice – apparemment au cours d’enquêtes précédentes, puisque Maud Graham est l’un des personnages récurrents des polars de Chrystine Brouillet.
La romancière parle d’ailleurs de Graham comme d’une bonne copine, qui se pose des questions sur sa vie privée, sur ses contradictions comme n’importe quel être humain.

Il semblerait que ce soit grâce à Chrystine Brouillet que le polar québécois ait acquis des lettres de noblesse dans son pays. Ici, hélas, on ne la connaît pas vraiment et c’est grâce à un ami du Québec que j’ai pu la découvrir.
Heureusement que je suis un peu familiarisée avec une partie du vocabulaire québécois grâce aux films qui ont été projetés en Belgique, car l’auteure écrit comme elle parle, en utilisant le vocabulaire de son pays, ce qui est certes savoureux et exotique, mais parfois un peu rebutant au niveau de la lecture.
Honnêtement, je ne considère pas que ce soit un très grand roman, l’écriture ne m’a plu qu’à demi, c’est un peu une lecture « bof-bof ».
Par contre la manière d’amener l’intrigue m’a plu.

Comme je le disais : une expérience intéressante.